Une équipe de chercheurs basés aux États-Unis – ainsi que Katharina Röltgen, chercheuse suisse du Tropeninstitut de Bâle – est parvenue à mettre au point un outil d'intelligence artificielle (IA) capable de diagnostiquer un large éventail d'infections et de pathologies en un seul coup d'œil, simplement en analysant les séquences génétiques des cellules immunitaires présentes dans des échantillons de sang.
Ce nouvel outil a démontré une remarquable précision en déterminant si les participants étaient en bonne santé ou s'ils étaient atteints de maladies telles que le COVID-19, le diabète de type 1, le VIH ou encore une maladie auto-immune comme le lupus. Il a même pu identifier si un individu avait récemment été vacciné contre la grippe, et ce, en une seule analyse. «Il s'agit d'une approche de séquençage unique qui capture tout ce à quoi le système immunitaire a été exposé», explique Sarah Teichmann, biologiste moléculaire à l'Université de Cambridge (Royaume-Uni), citée par la revue
«Nature».
L'étude, menée sur près de 600 patients et publiée dans la revue «Science» le 20 février 2025, présente des résultats très prometteurs. «Concrètement, notre ambition est de créer un modèle de référence du système immunitaire qui permettrait de retracer tout ce qu'une personne a rencontré et de le relier à ses soins de santé», souligne Sarah Teichmann. Et d'ajouter: «Il reste encore de nombreuses étapes à franchir pour y parvenir, mais c'est un premier pas.»
Les chercheurs ont adopté une approche novatrice en combinant les séquences des cellules B et T, là où la plupart des études précédentes s'étaient concentrées sur des analyses distinctes. Cette méthode a permis d'obtenir une vision plus complète de l'activité immunitaire.
Une précision remarquable
L'outil d'IA repose sur six modèles de Machine Learning. Lorsqu'il a été appliqué aux 542 participants pour lesquels des données complètes sur les cellules B et T étaient disponibles, il a obtenu un score de 0,986 – un résultat proche de la perfection, où 1 correspond à une performance idéale.
Les chercheurs ont notamment constaté que la combinaison des données issues des cellules B et T donnait les résultats les plus précis. Le diabète de type 1 et le lupus présentaient des signatures plus marquées dans les récepteurs des cellules T, tandis que le COVID-19, le VIH et la grippe étaient plus facilement détectables via les récepteurs des cellules B.
L’approche repose sur une idée fondamentale: le système immunitaire humain est, en soi, un puissant outil de diagnostic. «Le système immunitaire est un diagnostic naturel, et si nous apprenons comment il peut le faire, nous pourrons également le faire», explique Victor Greiff, immunologiste computationnel à l'Université d'Oslo.
Là où les tests font défaut
À l'avenir, les travaux de recherche pourraient évaluer si l'outil peut non seulement identifier les maladies, mais aussi déterminer leur stade d'évolution. L'équipe espère également que le séquençage du répertoire immunitaire permettra de mieux comprendre les facteurs de causalité de certaines pathologies.
Un outil prometteur, donc, mais pas encore prêt pour une application clinique. Pourtant, Maxim Zaslavsky, coauteur de l'étude et informaticien à l'Université de Stanford en Californie, estime qu'il pourrait un jour aider les cliniciens à diagnostiquer «des affections pour lesquelles il n'existe pas aujourd'hui de tests définitifs».