Une phrase qui peut faire la différence: «Êtes-vous inquiet?»

Les proches détectent souvent plus tôt qu’on ne le pense les signes de dégradation de l’état de santé d’un enfant. Une nouvelle étude souligne la pertinence de ces signaux et appelle à un véritable changement de culture dans la médecine d’urgence.

, 18 juillet 2025 à 09:31
dernière mise à jour le 10 septembre 2025 à 07:06
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Image symbolique: Taufiq Hasan / Unsplash
Récemment, les medias ont rapporté un cas dans lequel, selon les témoignages, les médecins d’un hôpital pédiatrique n’auraient pas su écouter ou auraient minimisé les inquiétudes d’une mère. Son petit garçon, âgé d’un an, avait été renvoyé à la maison, avant d’être réadmis à l'hôpital peu après – où il est finalement décédé.
Le groupe LUKS envisage désormais d’introduire la «Martha’s Rule», un principe testé depuis 2024 dans le système de santé britannique. Il s’agit concrètement de donner une voix systématique aux proches et d’intégrer leurs préoccupations dans le processus de prise en charge médicale.
Une vaste étude de cohorte récemment publiée apporte un éclairage scientifique nouveau sur ce sujet. Son objectif: analyser le lien entre les inquiétudes des proches et la survenue d’incidents critiques chez les enfants.
L’analyse porte sur les données de plus de 70'000 enfants et adolescents pris en charge pour des troubles aigus aux urgences pédiatriques d’un hôpital universitaire de Melbourne, en Australie. Parmi eux, près de 24'000 cas ont été étudiés plus en détail: au moment de l’admission, les proches ou les aidants ont été invités à répondre à une simple question: «Are you worried that your child is getting worse?». Êtes-vous inquiet que l’état de santé de votre enfant se détériore? Parallèlement, des paramètres cliniques – tels que les signes vitaux, les symptômes et l’état général – ont été enregistrés.
Le critère d’évaluation principal était la survenue d’un événement critique dans les 24 heures, défini par exemple comme une admission en soins intensifs, ou un recours à une ventilation mécanique ou à une assistance circulatoire.

Le facteur «intuition»

L’étude a mis en évidence une corrélation significative entre l’inquiétude des proches et l’évolution clinique: plus l’anxiété exprimée était grande, plus l’enfant risquait de connaître une aggravation de son état. Le «caregiver concern» s’est révélé être un indicateur plus fiable que certains paramètres cliniques seuls.
Dans 19,3% des cas, les parents avaient pressenti une détérioration avant même que les signes vitaux n’en témoignent.
En d’autres termes, l’intuition parentale peut sauver des vies. Leur inquiétude reflète parfois des changements subtils dans l’état de l’enfant, imperceptibles sur le plan médical à un instant donné.
Autre aspect remarquable de l'étude de l'Université Monash: seule une minorité des personnes interrogées (4,7%) a exprimé une inquiétude concernant une éventuelle détérioration. L’étude invite donc à remettre en question les stéréotypes concernant les parents supposément trop inquiets, dramatiques ou exigeants – et à accorder une attention justifiée aux proches réellement alarmés.
Les auteurs recommandent d'intégrer le «caregiver concern» dans l’évaluation des risques et les processus décisionnels des services d’urgence.

  • Écouter les proches – la sécurité des patients repensée. Outre-Manche, les proches des patients sont désormais invités à s’impliquer activement dans les décisions médicales. Une initiative baptisée «Martha’s Rule» produit des résultats inattendus en matière de sécurité et de qualité des soins. Ce principe est aujourd’hui à l’étude en Suisse.

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