Dans les hôpitaux suisses, les hommes continuent de représenter la majorité des médecins-chefs. Les femmes occupant des postes à haute responsabilité restent l’exception. C’est ce que révèle le nouveau Glass Ceiling Index de l’Université de Saint-Gall, qui sera rendu public à la mi-septembre.
Avec une valeur de 4,8, le corps médical se classe dernier dans la comparaison des secteurs d’activité, derrière les assurances (3,4) et les banques (2,6).
L’indice mesure le rapport entre la répartition des sexes dans l’ensemble du personnel et celle observée dans l’encadrement intermédiaire et supérieur. Une valeur de 1 correspondrait à une égalité parfaite. À titre de comparaison, l’indice est de 1,2 dans l’industrie technologique.
Dans les hôpitaux, le plafond de verre semble donc particulièrement difficile à briser. «Les femmes sont encore bien représentées dans les postes de direction inférieurs, mais ensuite, une rupture se produit quelque part. Elles n’arrivent plus à progresser», explique Ines Hartmann, coauteure de l’étude, dans l’
émission «Echo der Zeit» de la SRF. «C’est ce qu’on peut qualifier de plafond de verre: on ne voit pas à quoi cela est dû.»
«Culture de la peur et opportunités manquées»
Plusieurs femmes médecins, souhaitant rester anonymes, ont témoigné sur les ondes de la Radio SRF. Elles dénoncent une culture de la peur, une pression considérable et une concurrence acharnée, en particulier dans les hôpitaux universitaires.
À cela s’ajoute la structure même des hôpitaux, qui offrent relativement peu de postes de direction. «Le processus de promotion est d’autant plus décisif», souligne Hartmann. Souvent, ce sont ceux qui sont là depuis longtemps et qui font preuve de loyauté qui accèdent aux postes supérieurs, «pas forcément les personnes les plus qualifiées».
Promotion ciblée
Daniela Zeller-Simmerl, cofondatrice de la nouvelle association des femmes médecins-cheffes (Cmws), identifie encore d’autres obstacles. «Du fait d’un certain conditionnement social, les femmes ont souvent moins confiance en elles et devraient donc être encouragées de manière ciblée.» Forte de son expérience personnelle, elle connaît les barrières auxquelles se heurtent les femmes dans un milieu encore largement dominé par les hommes et s’engage résolument en faveur de la relève féminine.
La transparence dans l’attribution des postes à haute responsabilité est essentielle, insiste Zeller: «Il faut des procédures claires et compréhensibles, ainsi que davantage de modèles visibles montrant qu’une position de cheffe est accessible.» Des modèles flexibles, comme le job sharing, pourraient également favoriser l’accès des femmes à des postes de direction.
L’association des femmes médecins-cheffes, fondée l’année dernière, entend faire entendre sa voix tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du corps médical. En tant que section de
Medical Women Switzerland – créée il y a 102 ans –, elle mise sur le réseau, l’égalité salariale, la promotion de la relève, la transparence des nominations et le soutien mutuel.
Première médecin-cheffe: il y a plus de 100 ans
Il y a plus d’un siècle, une femme occupait déjà un poste de médecin-cheffe. En 1919, Hélène Kloss prit la direction de l’Institut de pathologie de Lucerne, face à trois concurrents masculins. Elle s’imposa grâce à ses compétences et à son expérience, bien que son sexe fût alors considéré comme un «obstacle».
Kloss resta en poste jusqu’en 1947, développa l’institut et réalisa notamment, en 1935, l’autopsie de la reine Astrid de Belgique, décédée dans un accident de voiture à Küssnacht.