La peau est considérée comme une barrière protectrice contre les facteurs environnementaux. Elle réagit également de manière sensible aux contraintes mécaniques telles que l'étirement ou la pression. Une équipe dirigée par l'immunologiste Élodie Segura (Inserm/Institut Curie) et le pharmacologue Stuart A. Jones (King's College London) a étudié l'influence des mouvements de massage sur la perméabilité cutanée et l'immunité.
Des essais réalisés sur des souris et, en partie, sur de la peau humaine ont montré qu'un massage de 20 minutes rendait la peau temporairement plus perméable aux macromolécules.
Proof of Concept: vaccin contre la grippe
Les chercheurs ont exploité cet effet pour administrer un vaccin contre la grippe (H1N1) à des souris non pas par injection, mais par massage cutané. Les animaux ont développé une réponse immunitaire comparable à celle observée après une injection intramusculaire.
Structure de la peau d'une souris après étirement, coloration histologique. Échelle: 100 micromètres. Image: Darawan Tabtim-On et Renaud Leclère | Institut Curie.
En cause: une ouverture temporaire des follicules pileux, qui a également déclenché une réaction inflammatoire locale. Une activé d'«immunité adaptative» a ainsi été déclenchée, soit une activit mécanisme qui est également à la base des vaccinations. «Le stress mécanique agit comme un signal de danger au sein de la peau. L’entrée dans la peau de composés du microbiote favorisée par l’étirement pourrait ainsi alerter le système immunitaire local sur la perte d’imperméabilité de la barrière cutanée et l’activer pour répondre au potentiel danger», explique Segura dans un
communiqué de presse.
Bientôt une alternative aux injections?
Il reste encore à déterminer dans quelle mesure ces résultats sont transposables à l'être humain. Les différences dans la structure de la peau ainsi que le rôle spécifique de certains types de cellules et composants du microbiome doivent encore faire l'objet de recherches approfondies. La possibilité que le massage ou le frottement favorise la pénétration de substances toxiques ou d'allergènes est également intéressante d'un point de vue toxicologique.
Si ces résultats sont confirmés, cette technique pourrait permettre l'administration de vaccins sans aiguille et non invasive, ce qui présenterait des avantages en termes d'acceptation, de faisabilité et, éventuellement, dans le cadre de campagnes de vaccination globales. Selon les chercheurs, des procédures standardisées seraient nécessaires dans la pratique clinique afin de garantir la reproductibilité et la sécurité.