Immunothérapie 2.0: ces récepteurs artificiels dopent les lymphocytes T anticancéreux

À Lausanne, des chercheurs de l'EPFL et du CHUV ont conçu des récepteurs synthétiques. Associés à des cellules CAR-T conventionnelles, ils renforcent l'efficacité de ces dernières face aux tumeurs solides.

, 4 novembre 2025 à 15:11
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Image symbolique: National Cancer Institute sur Unsplash
L’immunothérapie cellulaire, et en particulier les lymphocytes T modifiés (CAR-T), a transformé le traitement de plusieurs cancers du sang. Mais ces cellules issues de la bioingénierie peinent à venir à bout des tumeurs solides – comme celles du poumon, du sein ou de la prostate – où le microenvironnement tumoral neutralise souvent leur action.
Pour surmonter cette difficulté, des scientifiques de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) et de l’Université de Lausanne (UNIL-CHUV) ont développé une méthode computationnelle permettant de créer des récepteurs de protéines synthétiques.
  • Jan A. Rath, Lucas S. P. Rudden, Nazila Nouraee, et al.: «Computational design of synthetic receptors with programmable signalling activity for enhanced cancer T cell therapy», dans: «Nature Biomedical Engineering», octobre 2025. DOI: 10.1038/s41551-025-01532-3
Baptisés T-SenSER (tumor microenvironment-sensing switch receptors), ces récepteurs détectent les signaux solubles trouvés dans les tumeurs et les convertissent en signaux qui stimulent l’activité des lymphocytes T.
«Ce qui distingue cette approche des approches actuelles de conception protéique, c’est qu’elle ne traite pas les protéines comme des structures rigides», explique Patrick Barth, professeur au Laboratoire d’ingénierie des protéines et des cellules à l’EPFL, dans un communiqué.
En combinant des cellules CAR-T conventionnelles à ces récepteurs artificiels, l’équipe lausannoise – en collaboration avec l’Institut Ludwig pour la recherche sur le cancer – a observé une activité antitumorale renforcée dans des modèles précliniques de cancer du poumon et de myélome multiple.

Vers des immunothérapies de nouvelle génération

Les chercheurs ont conçu deux types de T-SenSER:
  • un récepteur sensible au VEGF, une protéine qui favorise la croissance des vaisseaux sanguins et qui est courante dans les tumeurs;
  • un autre réagissant au CSF1, une protéine qui freine normalement les défenses immunitaires dans les tumeurs.
Les lymphocytes T porteurs de ces récepteurs ont montré une meilleure reconnaissance du microenvironnement tumoral, un contrôle plus durable des tumeurs et une survie prolongée chez les modèles murins.
Selon Patrick Barth, cette étude «ouvre la voie à une nouvelle génération de biocapteurs personnalisés pour des applications de génie cellulaire, aussi bien fondamentales que cliniques.»
Ce travail, publié dans «Nature Biomedical Engineering», illustre le potentiel de l’ingénierie computationnelle pour créer des lymphocytes T «augmentés», mieux adaptés à l’environnement tumoral complexe des cancers solides.

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