Les procédures d'évaluation de l'efficacité, de l'adéquation et de l'économicité (EAE) des traitements médicaux, ainsi que la suspicion de surmédicalisation par les caisses maladie, représentent un problème persistant qui n'a jamais trouvé de solution satisfaisante. En février 2024, le Tribunal fédéral a d'ailleurs estimé qu'il ne suffisait pas de recourir à des méthodes statistiques pour conclure qu'un médecin avait excessivement et coûteusement traité ses patients, lui permettant ainsi d'obtenir un revenu indu. A contrario, il conviendrait d'effectuer «un examen complet au cas par cas».
En parallèle, les caisses maladie et la Fédération des médecins suisses FMH s'efforcent de clarifier la situation et de légitimer le contrôle statistique par le biais d'une nouvelle convention EAE. Cette convention, qui devrait remplacer celle de 2023 et entrer en vigueur en 2026, vise notamment à affiner la méthode de régression et à améliorer le screening statistique.
Cependant, un groupe de médecins exige désormais l'organisation d'une votation générale au sein de la FMH à ce sujet.
«Politique d'apaisement»
Concrètement, la Fondation Fairfond pour l'équité dans le domaine de la santé et l'association Éthique et médecine font front. Ils s'opposent fondamentalement à l'idée de sanctionner les médecins qui prescrivent des médicaments autorisés et remboursés par l'AOS, simplement parce qu'ils le font dans des proportions statistiquement flagrantes.
«La FMH, en tant que représentante de la profession médicale, devrait s'engager, dans l'esprit de son code, pour qu'aucun médecin ne soit sanctionné dans les procédures EAE pour avoir prescrit ces médicaments», écrit la fondation Fairfond. «Si elle l'autorise et l'inscrit dans les contrats EAE avec les assureurs, elle agit et communique à l'encontre de son code, et la médecine se dissout alors à vue d'œil au profit de l'économie.»
Environ 300 médecins ont déjà rejoint cette campagne de signatures. Le cardiologue Michel Romanens, qui a participé de 2013 à 2017 au groupe de travail technique EAE et aux négociations entre Santésuisse et la FMH, est une figure centrale de cette opposition. Selon lui, une votation générale est la dernière chance de protéger les cabinets libéraux de l'ingérence des assureurs: «Il faut éviter que la FMH ne cimente l'ancienne injustice avec un nouveau contrat EAE.»
L'organisation professionnelle se serait laissée rouler dans la farine par les assureurs, entraînant à tort de nombreux cabinets dans des procédures.
Où se situe la responsabilité?
Fairfond déplore la «politique d'apaisement» de la FMH envers ses partenaires tarifaires, craignant qu'elle ne devienne un «dangereux conformisme aux caisses-maladie, pour ne pas dire une soumission à ces dernières, lorsque les positions sont par essence inconciliables et que le partenaire tarifaire se révèle incapable d'apprendre et de faire des compromis», comme l'indique une lettre ouverte adressée à la présidente de la FMH, Yvonne Gilli.
L'objectif est désormais d'obtenir, à terme, un «arrêt de la méthode inappropriée de screening» grâce à la collecte de signatures: la FMH doit résilier l'ancien contrat datant de 2023.
De plus, «le nouveau contrat doit définir l'économicité du point de vue médical: est économique toute prescription médicale adéquate», peut-on lire dans le
projet de proposition à l'attention de la Chambre médicale: «À efficacité égale, la procédure la moins coûteuse doit être choisie. Les sanctions à l'encontre des fournisseurs de prestations ne sont prises qu'en cas de preuve de traitements inappropriés au niveau individuel par facture établie, la charge de la preuve incombant toujours aux assureurs-maladie. Les méthodes statistiques intégrant les coûts moyens (niveau I) ou les groupes de coûts pharmaceutiques respectivement les hospitalisations de l'année précédente sont en principe exclues des procédures de contrôle.»
Cette opposition fondamentale intervient alors que les négociations entre médecins et assureurs sont toujours en cours et que leurs résultats ne sont pas encore connus. L'objectif serait de refléter la réalité de la pratique actuelle et de permettre, entre autres, l'admission de cabinets de groupe, déclare la FMH à ce sujet: «Il existe cependant encore des divergences importantes concernant l'intégration de la jurisprudence récente du Tribunal fédéral dans la nouvelle convention». Dans ce contexte, la FMH s'engage fermement en faveur de solutions qui satisfont de manière optimale l'ensemble du corps médical.
Ce n'est qu'une fois les négociations terminées que les contrats seront soumis au vote des organisations membres selon le processus habituel.