Depuis dix ans, les femmes en Suisse sont totalement exemptées de participation aux coûts dans le cadre de l'assurance de base, avant et après la naissance d'un enfant. De la 13ème semaine de grossesse jusqu’à huit semaines après l’accouchement, elles ne paient ni franchise ni quote-part. Le Parlement a introduit cette mesure afin d’éviter que les femmes souffrant de complications liées à la grossesse ne paient davantage que les autres assurées.
Cette modification de la loi, entrée en vigueur en 2014, a ainsi offert un terrain d’étude idéal pour évaluer l’impact de la participation aux coûts sur les comportements dans le système de santé. Une équipe de recherche de la CSS s’est penchée sur la question en analysant les données des caisses-maladie entre 2012 et 2019, couvrant près de 13'500 naissances par an.
Les premiers résultats sont clairs: la mesure a entraîné une augmentation modérée des dépenses totales. Certaines prestations ont toutefois été nettement plus sollicitées: la physiothérapie a été utilisée 30% plus souvent et les coûts liés aux analyses de laboratoire ont augmenté de 5%.
En revanche, les économistes de la CSS n’ont constaté aucune hausse de la demande pour les prestations stationnaires – ce qui n’a rien de surprenant.
Les ménages à faibles revenus (en dessous de la médiane) sont ceux dont les habitudes ont le plus évolué. Dans ce groupe, les dépenses totales de l'AOS ont augmenté d’environ 5% après l’exonération, et même de 50% pour la physiothérapie. Le recours aux examens de laboratoire a également progressé.
Une morbidité néonatale en baisse
L’étude s’est aussi penchée sur les effets potentiels de cette politique sur la santé des nouveau-nés. «Pour ce faire, nous examinons l’augmentation de la demande parmi les personnes à bas revenu, que l’on ne retrouve pas chez celles à revenu élevé»,
expliquent les auteurs.
Conclusion: la morbidité moyenne des nouveau-nés, en fonction du revenu, a diminué. La suppression de la participation aux coûts pour les femmes à faibles revenus a probablement eu un effet bénéfique. «Nos résultats suggèrent une légère amélioration de la santé des nouveau-nés issus de familles modestes, probablement en raison d’un recours accru aux services de santé pendant la grossesse.»
L’augmentation des prestations se chiffre en moyenne à environ 150 francs par grossesse, soit des coûts supplémentaires de 6 à 7 millions de francs par an pour l’assurance obligatoire des soins (AOS). S’y ajoutent les cotisations non perçues auprès des femmes enceintes, estimées entre 40 et 50 millions de francs par an.