Chirurgie viscérale: la relève est là mais la pratique s’amenuise

Selon une nouvelle étude, la Suisse comptera davantage de chirurgiens viscéraux d’ici 2040. Mais chacun d’eux opérera moins souvent – une évolution qui pourrait menacer la qualité des soins.

, 27 août 2025 à 12:48
dernière mise à jour le 9 octobre 2025 à 07:44
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Opération du pancréas avec le robot Da Vinci – ici à l'Hôpital universitaire de Zurich | Image: USZ, DR
Dans les années à venir, la Suisse devrait enregistrer une nette augmentation du nombre de chirurgiens viscéraux. Une bonne nouvelle, certes. Mais la moins bonne, c’est que ces spécialistes pourraient bien être moins expérimentés.
Les modèles de formation devront donc probablement être adaptés, conclut une nouvelle étude sur l’avenir de la chirurgie viscérale en Suisse.
Cette étude a été réalisée par une équipe de chirurgiens des hôpitaux cantonaux de Thurgovie, sous la direction de Hans Grossen. Elle s’intéresse à l’évolution de la relève chirurgicale, du nombre d’opérations et des capacités de formation. Les prévisions s’étendent jusqu’en 2040 et s’appuient sur différentes sources de données.
  • Hans Grossen, Matthias Baechtold, Pia Antony, Pietro Renzulli, Fabian Hauswirth, Pascal Probst, Markus K. Muller: «Future demand for visceral surgeons in Switzerland: an empirical study», in: Langenbeck’s Archive of Surgery, August 2025.
  • Doi: 10.1007/s00423-025-03833-2
Rétrospectivement, les chiffres montrent une forte croissance du côté de la formation : le nombre de diplômes de médecine est passé de 2'725 en 2011 à 4'647 en 2023 – et devrait dépasser les 6'000 d’ici 2040. Le nombre de chirurgiens généralistes est passé de 1'127 en 2009 à 1 557 en 2023, avec une proportion de femmes presque doublée (de 11 à près de 25%).
La chirurgie viscérale reste toutefois dominée par les hommes: en 2023, on comptait 303 spécialistes, dont seulement 11% de femmes.

Moins d'occasions d'opérer

Selon les prévisions thurgoviennes, le nombre de chirurgiens viscéraux augmentera d’environ 50% d’ici 2040, atteignant environ 460 spécialistes. L’augmentation du nombre de diplômés et l’immigration continue de médecins étrangers devraient favoriser cette évolution.
En parallèle, les chercheurs ont étudié l’évolution des cas opératoires:
  • Appendicectomies: de 12'400 en 2023 à près de 14 700 en 2040.
  • Opérations complexes du pancréas: de 909 en 2023 à environ 1'136 en 2040.
Enfin, ces chiffres ont été mis en relation: le nombre moyen d'appendicectomies par chirurgien devrait passer de 8,0 en 2023 à 6,8 en 2040. Et le nombre d'opérations du pancréas par chirurgien viscéral pourrait passer d'un peu plus de trois cas par an en moyenne à moins de deux et demi en 2040.

Nombre d'opérations par chirurgien: situation actuelle et évolution

  • Nombre d'appendicectomies par chirurgien généraliste: baisse de 9,10 en 2013 à 7,97 en 2023. Prévisions jusqu'en 2040: poursuite de la baisse à 6,76 (-13,8%).
  • Opérations du pancréas par chirurgien viscéral: le chiffre a oscillé entre 2,83 et 3,34 dans les années précédant 2023. Il était de 2,87 en 2024. Prévisions jusqu'en 2040 : baisse à 2,46 (-14,4%).
  • Chirurgiens viscéraux par population : augmentation de 2,48/100 000 en 2010 à 4,62/100 000 en 2040 (+86%).
Non seulement ces proportions évoluent, mais d’autres facteurs entrent aussi en jeu: la tendance au travail à temps partiel, les nouvelles réglementations du temps de travail (modèle 42+4), ou encore le développement des interventions ambulatoires.
La relève est donc bien présente en chirurgie viscérale en Suisse. Mais si «cette tendance peut certes dissiper les craintes d’une éventuelle pénurie de chirurgiens, elle soulève également des questions quant à une expérience adéquate et au maintien de soins de haute qualité», concluent les auteurs. Cela est particulièrement vrai «dans des domaines techniquement exigeants comme la chirurgie viscérale, où la relation entre le volume de traitement et le résultat est bien établie».
Ce constat ne concerne d’ailleurs pas seulement la chirurgie viscérale. L’ambulantisation et la réduction des heures de travail des médecins assistants limiteront probablement aussi les possibilités opératoires dans d’autres disciplines chirurgicales, poursuivent Grossen, Baechtold et al.
Ces résultats soulignent la nécessité de prendre des mesures pour encourager davantage de femmes à choisir cette spécialité. La Suisse a également besoin d’un suivi constant de l’évolution du personnel et des programmes de formation, afin de maintenir le niveau actuel des soins chirurgicaux.
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