Et si les attentes des patients pouvaient réellement influer sur l’issue d’un traitement? Cette question, longtemps posée, vient de trouver un nouvel éclairage grâce à une étude publiée dans la prestigieuse revue médicale JAMA (Journal of the American Medical Association).
Trois chercheurs allemands – Meike Shedden-Mora (Faculté de médecine de Hambourg), Winfried Rief (Université de Marbourg) et Johannes Laferton (Université de santé et de médecine de Potsdam) – se sont penchés sur un facteur parfois oublié de la prise en charge thérapeutique: la communication entre soignant et patient, et son rôle dans la formation des attentes.
L'effet d'une attente positive
Leur constat est clair: plus un patient a des attentes positives vis-à-vis d'un traitement, plus celui-ci a de chances d'être efficace. À l'inverse, des attentes négatives peuvent non seulement limiter l'effet du traitement, mais aussi accroître le risque d'effets secondaires.
Mais comment orienter ces attentes sans tromper? C'est précisément la question à laquelle ces psychologues cliniciens ont tenté de répondre en identifiant quatre stratégies de communication fondées sur des données probantes.
1. Comprendre les attentes et les expériences passées
La première démarche préconisée consiste à interroger le patient sur ses expériences passées. Plusieurs études le montrent: ces expériences ont une influence considérable sur les attentes futures. En pratique, des questions simples telles que «Que pensez-vous que ce traitement pourra vous apporter?» ou «Avez-vous des craintes particulières?» permettent de faire émerger des représentations essentielles pour ajuster la communication et l'accompagnement.
2. Renforcer la relation médecin-patient
Une relation de confiance, chaleureuse et empathique permet, elle aussi, d'améliorer les résultats. «Dans une étude sur l’acupuncture placebo, les patients atteints du syndrome du côlon irritable répondaient mieux au traitement lorsque le praticien faisait preuve d’empathie», explique le professeur Rief.
Des gestes simples contribuent à développer une relation de confiance: poser des questions ouvertes, écouter activement, reformuler ce que dit le patient, établir un contact visuel ou encore faire preuve de compréhension non verbale. Savoir se montrer à la fois compétent et bienveillant apparaît déterminant – une combinaison qui, selon les auteurs, fait toute la différence.
Pour autant, compétence ne signifie pas arrogance, rappellent les auteurs, qui recommendent de partager son expérience avec des cas similaires, sans exagérer ni donner de faux espoirs.
3. Encourager des attentes positives… sans mentir
Établir, avec le patient, des objectifs concrets et réalistes, comme pouvoir faire une sortie ou effectuer un voyage après une intervention, peut contribuer à améliorer significativement la récupération. Dans certaines études, les patients suivant un plan de rétablissement personnalisé ont quitté l’hôpital jusqu’à cinq jours plus tôt que ceux n'en bénéficiant pas.
Les chercheurs insistent toutefois sur une limite éthique importante: ne pas induire le patient en erreur. «Surévaluer les bénéfices pourrait heurter le principe d’autonomie du patient», avertit le professeur Laferton. Il s'agit donc de formuler des attentes positives, réalistes et alignées sur les valeurs personnelles du patient.
4. Réduire la peur des effets secondaires
Dernier levier, souvent ignoré: la manière dont on informe sur les effets secondaires. Une information anxiogène peut aggraver l’apparition de ces effets, quand une présentation équilibrée – soulignant aussi les bénéfices – peut les atténuer.
Ainsi, une étude sur des patients traités au méthotrexate a montré que ceux à qui les effets secondaires étaient expliqués comme un signe d’efficacité du médicament en souffraient moins et interrompaient moins fréquemment leur traitement
Au-delà de l’étude, ce travail rappelle que le soin ne se limite pas aux prescriptions. La manière dont le médecin écoute, parle, explique et s’engage dans la relation influence directement l’efficacité du traitement. Comme le résume le professeur Rief: «Chaque médecin, psychothérapeute ou physiothérapeute devrait être conscient de l’impact de sa communication.»