Planification hospitalière: pression supplémentaire sur les cantons

Coordination renforcée: les cantons ne doivent plus seulement aligner leurs listes d’hôpitaux, mais aussi s’accorder sur les mandats de prestations et les attribuer conjointement.

, 21 mars 2025 à 10:31
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Esther Friedli, conseillère aux États UDC: «La planification hospitalière suprarégionale reste limitée.» | Capture d'écran: Parlement
Lorsqu’à l’automne 2023, la hausse des primes d’assurance maladie provoquait un nouveau tollé à travers la Suisse, Martin Landolt, alors président de Santésuisse, déclarait dans le «Tages-Anzeiger»: «Au lieu des 26 cantons, c’est la Confédération qui doit planifier les hôpitaux».
Si cette affirmation peut se comprendre d’un point de vue factuel, elle demeure politiquement irréaliste. Des efforts vont toutefois dans cette direction.

Échec en Suisse alémanique

Six cantons alémaniques avaient envisagé de planifier ensemble leurs hôpitaux. Après trois années de travail, les Grisons, Glaris et la Thurgovie se sont retirés du projet. Ne restaient donc plus que trois partenaires: Saint-Gall et les deux Appenzell, pour poursuivre le «modèle de soins hospitaliers pour l’Est».
Depuis l’introduction du nouveau financement hospitalier en 2012, les cantons sont tenus de coordonner leurs planifications. Pourtant, lors des débats sur la motion de la commission «Renforcer la planification hospitalière grâce à des listes d’hôpitaux intercantonales», la conseillère aux États UDC Esther Friedli constatait que la coordination suprarégionale restait limitée.

Succès mesuré

«Les quelques tentatives de planification intercantonale se comptent sur les doigts d’une main», a souligné la Saint-Galloise à l’accent bernois. Ces efforts se limitent à la planification elle-même, sans s’étendre à l’attribution coordonnée des mandats de prestations hospitalières.
La motion de la Commission de la santé publique du Conseil des États, déposée en janvier 2025 et examinée durant la session de printemps, ne vise pas uniquement à renforcer la coordination de la planification hospitalière: elle entend aussi harmoniser et confier collectivement les mandats de prestations entre les cantons au sein d’une même région de soins.
Si les cantons ne s’en acquittent pas, la Confédération doit pouvoir intervenir à titre subsidiaire – comme c’est déjà le cas pour la médecine hautement spécialisée.

Engler et Stark

La motion a été nettement adoptée par 41 voix contre 2. Seuls Stefan Engler (Centre, Grisons) et Jakob Stark (UDC, Thurgovie) s’y sont opposés – deux élus issus de cantons justement retirés du projet de coopération hospitalière en Suisse orientale. À noter que Stefan Engler fut également directeur de la santé publique des Grisons.
La conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider s’est également exprimée contre la motion, mais non pour des raisons de fond. Elle a évoqué les travaux déjà en cours. Depuis début 2022, une disposition d’ordonnance relative au développement des critères de planification impose une coordination renforcée de la planification hospitalière.

Un moment mal choisi

«Élaborer une planification hospitalière est un processus complexe, qui demande du temps», a-t-elle argumenté. C’est pourquoi le Conseil fédéral prévoit un délai de mise en œuvre de quatre ans pour la médecine somatique aiguë, et de six ans pour la psychiatrie et la réadaptation. Modifier la loi dès maintenant serait prématuré, et risquerait de compromettre les évaluations actuellement menées dans les cantons.
Parmi les différents travaux en cours, Baume-Schneider a également évoqué le postulat «Renforcer la planification hospitalière intercantonale pour améliorer les soins et les rendre plus efficaces» de la conseillère nationale Sarah Wyss (Socialiste). Le rapport correspondant devrait être disponible fin 2025.

Tirer d'abord, réfléchir ensuite

Modifier la loi avant même d’avoir les résultats des rapports d’évaluation? L’affaire n’est pas sans rappeler le débat sur la motion Hurni, concernant la lutte contre la pénurie de médecins, adoptée la veille par le Conseil des États, alors que plusieurs rapports et travaux d’application sont encore en cours.
Le conseiller aux États zougois Matthias Michel (PLR) a résumé cette «inflation d’initiatives» par une formule cinglante: «Ce serait nouveau pour moi que nous demandions des rapports et que nous sachions déjà ce qu’il faut faire avant même qu’ils ne soient publiés. Si c’est le cas, autant économiser les rapports de postulat et passer directement aux mesures, qu’elles soient utiles ou non.»
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