Maladies rares: une loi fédérale en consultation pour combler un vide de vingt ans

Soutenue par les organisations de patients, dont la fondation valaisanne MaRaVal, la future loi fédérale sur les maladies rares pourrait mettre fin à une longue période d’attentisme. Une consultation décisive s’est ouverte cet automne.

, 9 décembre 2025 à 08:45
image
Image: MaRaVal, aidée de l’IA
En septembre 2025, la Confédération a mis en consultation un avant-projet de loi fédérale sur les mesures de lutte contre les maladies rares, ouverte jusqu’au 12 décembre. Ce texte très attendu vise à combler un vide juridique persistant: en Suisse, les maladies rares concerneraient quelque 650’000 personnes, mais ne disposent toujours d’aucun cadre légal spécifique.

Du concept national à la loi

En 2014, le Conseil fédéral avait pourtant adopté un Concept national maladies rares (CNMR), élaboré avec le concours des cantons, des organisations de patients et des experts concernés. Si cette stratégie a permis de poser les premiers jalons – registre national (RSMR), centres spécialisés (CMR et CRMR), soutien aux patients, recherche, formation, etc. – l’absence de base légale a limité sa portée et ralenti sa mise en place, sans compter que le financement des mesures qu’il contient n’y était même pas évoqué.
La future loi vise ainsi à donner une assise durable à ces mesures, en définissant clairement les responsabilités, les financements et les mécanismes de coordination entre les partenaires.

Des attentes fortes du terrain

Les acteurs de terrain, en particulier les organisations de patients, saluent unanimement cette étape. La fondation MaRaVal – maladies rares valais – seltene krankheiten wallis, active dans l’accompagnement des personnes concernées et pionnière en Suisse dans ce domaine, estime notamment que le texte ne devrait pas se limiter aux aspects médicaux: l’accompagnement psychosocial, la coordination des interventions, ainsi que l’inclusion scolaire et professionnelle doivent être reconnus comme des composantes à part entière de la prise en charge.

image
Photo: Vera Markus
Christine de Kalbermatten est mère d’une jeune adulte touchée par une maladie ultra-rare. Après des études de pharmacie et une formation postgrade en pharmacie clinique, elle se spécialise en accompagnement des personnes atteintes de maladie génétique et de leur famille à l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Elle consacre son travail de mémoire à la situation de familles valaisannes concernées par une maladie rare. Elle devient ensuite généraliste en assurances sociales et se forme en case management. Après avoir été vice-présidente de ProRaris, l’Alliance Maladies Rares Suisse, elle travaille pour cette dernière comme responsable du projet-pilote FAC Valais «Former – Accompagner – Coordonner» dont elle est l’initiatrice.
Elle dirige depuis avril 2019 MaRaVal – maladies rares valais – seltene krankheiten wallis, qu’elle a fondée en 2017 et présidée entre 2017 et 2019.
Les maladies rares ne relèvent pas uniquement de la médecine: elles touchent bien d’autres aspects de la vie quotidienne. Alors que plus de 95% des maladies rares ne bénéficient d’aucun traitement (!), ces mesures devraient être considérées comme un projet thérapeutique en soi.

Enjeux politiques et économiques

Le projet de loi pose aussi des questions sensibles comme l’enregistrement des données, le financement des structures de soins spécialisées, la valorisation du travail d’information, de renseignement et d’entraide titanesque réalisé par les organisations de patients ou encore la participation financière équitable des cantons et de la Confédération.
Dans un contexte de maîtrise des dépenses de santé, il s’agira d’éviter que la future loi ne reste symbolique et qu’elle ne renvoie trop de responsabilités aux cantons ou aux structures de soins spécialisées, déjà confrontés à des charges croissantes.
Quant aux organisations de patients, elles ont compensé durant des années les lacunes systémiques; leur engagement a été héroïque et nombre de leurs dirigeants sont à bout de force. Sans intervention fédérale, certaines structures essentielles atteindront leur point de rupture; elles disparaîtront et des milliers de familles se retrouveront sans soutien… Le temps n’est plus aux encouragements: il est à l’intervention!

Une consultation décisive

Cette consultation, ouverte à toutes les parties prenantes, représente une occasion unique de faire entendre la voix des personnes concernées. Les contributions des professionnels, financeurs et organisations de patients seront déterminantes pour façonner un cadre équilibré: entre réalités médicales, innovation, équité d’accès aux soins et reconnaissance du vécu des patients et de leurs proches.
Après plus de dix ans de discussions et d’expérimentations cantonales, la Suisse pourrait enfin inscrire noir sur blanc une politique nationale durable pour les maladies rares.

La fondation MaRaVal

Fondée en 2017 par Christine de Kalbermatten à la suite du projet pilote FAC Valais (Former – Accompagner – Coordonner), MaRaVal s’est imposée comme une organisation bilingue, innovante et en pleine expansion.
Basée à Sion, elle offre un accompagnement personnalisé aux personnes atteintes de maladies rares ainsi qu’à leurs proches, que ce soit individuellement ou en groupe. Elle assure également la coordination entre les acteurs spécialisés du domaine et propose une offre régulière de formation continue. Son expertise est également mise à disposition des décideurs et des bailleurs de fonds.
  • Juin 2025: MaRaVal passe du statut d’association à celui de fondation. MaRaVal – maladies rares valais – seltene krankheiten wallis franchit une nouvelle étape dans son développement en accédant au statut de fondation reconnue d’utilité publique.

  • politique
  • Maladies rares
  • MaRaVal
Partager l'article

Loading

Commentaire

Plus d'informations sur ce sujet

image

Les soignants sortent le carton rouge – plus de 5000 manifestants sur la Place fédérale

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté contre la dégradation des conditions de travail et les retards dans la mise en œuvre de l’initiative sur les soins infirmiers. L’ASI met en garde contre de nouvelles actions de lutte si rien ne bouge.

image

Vaud: un crédit largement accepté pour moderniser deux institutions liées au CHUV

Le Grand Conseil vaudois a donné son feu vert à un investissement de près de 67 millions de francs pour offrir un nouveau souffle au Laboratoire antidopage et à l’Institut de radiophysique, aujourd’hui à l’étroit dans des locaux vétustes.

image

Fribourg veut engager son ou sa première infirmière cantonale

La fonction d'infirmier ou d'infirmière cantonale, encore rare en Suisse, pourrait bientôt devenir réalité à Fribourg.

image

Vaud: les horaires de nuit des professionnels de santé seront davantage compensés

De 20 à 25%: c'est l'augmentation des compensations annoncée par l'État de Vaud pour les professionnels de santé du canton. Cette mesure, intégrée au programme InvestPro, s'accompagne d'autres dispositions.

image

Nord vaudois: «L’hôpital d’Yverdon doit rester à Yverdon»

Le principal site des Établissements hospitaliers du Nord vaudois (eHnv) restera-t-il à Yverdon-les-Bains? La Municipalité défend cette option avec vigueur.

image

Nouveau nom, ancien dossier: le Conseil fédéral transforme le DEP en DES

Le Conseil fédéral enterre aujourd'hui l'impopulaire dossier électronique du patient – et le transforme aussitôt en «dossier électronique de santé».