Easiness effect: quand la vulgarisation scientifique conduit à se surestimer

Rendre la science plus accessible, oui – mais pas à n’importe quel prix. Une étude montre que les vidéos explicatives trop simplifiées renforcent une illusion de compétence chez leurs spectateurs.

, 5 juillet 2025 à 13:59
image
Montage: Medinside
Les résumés vidéo peuvent présenter des études de manière particulièrement parlante, tout en induisant en erreur. Le visionnage d’une vidéo courte et aisément compréhensible pousse souvent le spectateur à se croire suffisamment compétent pour évaluer les affirmations scientifiques. Indépendamment des connaissances préalables, le phénomène bien connu sous le nom d’«easiness effect» se manifeste.
  • Salzmann, S., Walther, C., & Kaspar, K.: «A new dimension of simplified science communication: The easiness effect of science popularization in animated video abstracts», dans: «Frontiers in Psychology», juillet 2025.
  • DOI: 10.3389/fpsyg.2025.1584695
Une étude du département de psychologie de l’Université de Cologne s’est penchée sur ce phénomène.

Les néophytes de niveau universitaire sont particulièrement vulnérables

L’équipe du professeur Kai Kaspar a transformé quatre résumés d’études scientifiques en courtes vidéos – chacune en deux versions: l’une avec un langage spécialisé et une présentation complexe, l’autre avec un langage simplifié.
Quelque 369 personnes ont initialement participé à l’étude. Le nombre de participants retenus est finalement descendu à 179, en raison de questionnaires incomplets (n = 105), de vidéos non visionnées (n = 12) ou de critères non remplis (n = 65). Le groupe cible était constitué de non-spécialistes de niveau universitaire, un profil connu pour sa sensibilité à l’effet de facilité.
L’échantillon final comprenait 135 femmes, 43 hommes et une personne non binaire, âgés de 18 à 45 ans (moyenne: 25,1 ans). La majorité étudiait l’économie d’entreprise, l’architecture ou les sciences sociales. Les personnes ayant étudié la psychologie ou ayant mis exceptionnellement longtemps à répondre ont été exclues de l’analyse.
Après avoir visionné les résumés vidéo, les participants ont évalué les éléments suivants:
  • la compréhensibilité de l’étude;
  • la crédibilité perçue des contenus;
  • leur confiance en leur propre capacité à évaluer l’étude;
  • leur perception de leur aptitude à prendre une décision sur la base de l’étude, sans information complémentaire;
  • leur intérêt pour des informations plus approfondies;
  • leur propension à partager, aimer ou commenter les contenus sur les réseaux sociaux.
Résultat: les vidéos simplifiées ont été jugées non seulement plus compréhensibles et plus crédibles, mais elles ont également conduit à une confiance nettement plus élevée dans les capacités de jugement personnelles.
«Les résultats soulignent la nécessité de stratégies responsables en communication scientifique.» —Kai Kaspar, directeur de l’étude, Université de Cologne
L’étude a également testé si cet effet pouvait être réduit par une vidéo de débriefing diffusée en amont. Verdict: l’information préalable n’a pas suffi à contrer la surestimation de soi. Contrairement à l’hypothèse des chercheurs, le biais persiste même lorsque ses mécanismes et conséquences sont explicités à l’avance.

Pertinence pour la communication médicale

Ce phénomène revêt une importance particulière pour les professionnels de santé: qu’il s’agisse de vidéos destinées aux patients, de portails de santé ou de contenus pour les réseaux sociaux, la simplification peut certes être utile – mais elle comporte aussi le risque d’étouffer l’esprit critique.
«Cette expérience montre que l’“easiness effect” peut être déclenché de manière prévisible par des résumés vidéo, et qu’il persiste même chez des personnes informées de ses effets potentiellement négatifs sur l’évaluation de leurs propres compétences», explique le responsable de l'étude, le professeur Kai Kaspar, dans un communiqué de presse de l'Université de Cologne.
  • communication
  • Easiness effect
  • formation
Partager l'article

Loading

Commentaire

Plus d'informations sur ce sujet

image

Violences domestiques: Fribourg forme à son tour le personnel des pharmacies

Pour répondre à la montée des violences domestiques dans le canton, Fribourg mise sur la formation du personnel des pharmacies pour mieux détecter et orienter les victimes – une initiative déjà largement adoptée en Suisse romande.

image

Problème récurrent à l'ISFM: «nous n’avons pas fait le nécessaire»

Quand la bureaucratie freine le développement professionnel: les demandes de titres s'accumulent à l'Institut suisse pour la formation médicale postgraduée et continue. Le président de l'ASMAC, Severin Bärlocher, s'est penché sur la question.

image

BZ Pflege: renouvellement du conseil d'administration

Barbara Radtke est désormais à la tête du centre de formation en soins infirmiers de Berne – en parallèle de ses activités de membre du conseil d'administration du groupe Insel.

image

Sélectionnées pour transformer le milieu académique suisse

Issues de diverses universités suisses, 26 professeures sélectionnées participent au programme de formation H.I.T., une initiative de leadership au féminin conçue pour briser le plafond de verre et redéfinir le milieu académique helvétique.

image

Le RFSM reconnu pour ses missions académiques

Le Réseau fribourgeois de santé mentale peut désormais utiliser l'appellation «hôpital de formation universitaire et de recherche» – une reconnaissance pour son engagement dans l'enseignement et la recherche clinique.

image

Never Words: ces expressions à éviter auprès des patients

Certains mots, en apparence anodins, peuvent fragiliser les patients gravement malades. Une étude propose des alternatives pour encourager un dialogue empathique et apaisant.

Du même auteur

image

Lutte contre les pénuries de médicaments: lancement d’une plateforme numérique

La Confédération mise sur le numérique pour mieux surveiller les pénuries. La nouvelle plateforme des produits thérapeutiques est désormais opérationnelle: une première étape vers la mise en place d’un système national d’alerte précoce pour les médicaments vitaux.

image

Mieux gérer la douleur: le CHUV crée un groupe pluridisciplinaire

Le Service de médecine nucléaire et d’imagerie moléculaire du CHUV s’est doté d’un groupe de travail pluridisciplinaire pour améliorer la prise en charge de la douleur, qu’elle soit aiguë ou chronique.

image

CHUV: sept nouveaux visages pour un rôle central

Les équipes infirmières s'agrandissent: sept centres interdisciplinaires d'oncologie accueillent de nouveaux professionnels spécialisés dans l’accompagnement personnalisé des patients.