La maladie d’Alzheimer et d'autres maladies apparentées touchent aujourd'hui 161'100 personnes en Suisse, selon l'
organisation Alzheimer Schweiz. Si, chaque année, 34'800 nouveaux cas y sont diagnostiqués, les femmes représentent les deux tiers des malades, et plus de 8'100 personnes développent la maladie avant l'âge de 65 ans. Compte tenu du vieillissement de la population, les projections anticipent 285'700 cas d’ici 2050.
Des maladies encore trop ignorées
Ainsi, lors de la conférence de lancement, Richard Horton, rédacteur en chef de «The Lancet», a tenu à rappeler que ces maladies sont encore trop souvent ignorées par les pouvoirs publics et absentes des stratégies de santé publique. Aux côtés d'experts internationaux, il appelle à une meilleure reconnaissance de la maladie d'Alzheimer et des autres formes de démence comme priorité mondiale, au même titre que les maladies cardiovasculaires ou le cancer.
Parmi les principaux contributeurs à cette série d'articles figure Giovanni Frisoni, directeur du Centre de la mémoire aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et professeur de neurosciences à l’Université de Genève. Il a coordonné deux des trois publications de la série.
Des outils diagnostics en constante évolution
Le premier article, intitulé
«New Landscape of the Diagnosis of Alzheimer’s Disease», retrace l’évolution du diagnostic. Longtemps, seule l’autopsie permettait de confirmer la présence de la maladie. Aujourd'hui, les cliniciens disposent de biomarqueurs cérébraux (β-amyloïde et protéine tau) mesurés par tomographie par émission de positons (TEP) ou dans le liquide céphalorachidien. Ces outils permettent d'établir un diagnostic au niveau moléculaire, une étape indispensable pour déterminer l'éligibilité aux nouveaux traitements anti-amyloïdes.
L’arrivée prochaine de tests sanguins de routine pourrait encore bouleverser le parcours diagnostique. «Ces biomarqueurs facilement accessibles entraîneront une nouvelle révolution diagnostique et transformeront profondément les systèmes de santé», soulignent les auteurs.
Des traitements innovants mais controversés
Un autre article, intitulé
«Alzheimer’s disease outlook: controversies and future directions», se penche sur la question des anticorps monoclonaux anti-β-amyloïde. Pour la première fois dans le cadre d'essais cliniques contrôlés randomisés, ces derniers ont été associés à une réduction des dépôts amyloïdes et du déclin cognitif. Mais le débat reste vif. Certains experts y voient un progrès majeur, tandis que d'autres jugent le rapport bénéfice/risque encore insuffisant.
Les auteurs comparent également ces thérapies à des produits biologiques déjà utilisés dans le traitement d'autres maladies (cancer, sclérose en plaques, polyarthrite rhumatoïde), et invitent à réfléchir aux coûts et à l'accessibilité de ces thérapies à l'échelle mondiale.
Au-delà des pistes de traitement, la série insiste sur l’importance des interventions psychosociales, des stratégies de prévention et de la médecine personnalisée. «La maladie d’Alzheimer doit être envisagée comme un défi sociétal et non seulement médical», conclut Giovanni Frisoni.