«Insuffisance hépatique», sous ce titre, la «NZZ am Sonntag» met en lumière un constat surprenant: les cliniques suisses se montrent de plus en plus réticentes à pratiquer des transplantations. Le message principal de l’article: les hôpitaux suisses renoncent à transplanter des foies de donneurs pourtant potentiellement compatibles. Dans certains cas, ces organes sont même envoyés à l’étranger. Pendant ce temps, en Suisse, des patients en attente d’un foie décèdent faute de greffe.
«Il y a effectivement un problème», confirme Franz Immer, directeur de la fondation Swisstransplant, cité par la NZZaS. «Le taux d’utilisation des organes a baissé de manière significative au cours des deux dernières années. Il y a encore quelques années, la Suisse était en tête de l’Europe, aux côtés de l’Italie, en matière de transplantation. Aujourd’hui, nous sommes passés en dessous de la moyenne.»
Selon lui, les centres de transplantation hésitent désormais davantage à envoyer une équipe pour évaluer sur place les foies de donneurs jugés incertains. «Aujourd’hui, cette pratique s’est fortement réduite», explique Immer.
La tendance est particulièrement marquée pour les foies prélevés après un arrêt cardio-circulatoire, plutôt qu’à la suite d’une mort cérébrale – des organes dont les résultats post-greffe sont souvent jugés moins satisfaisants. Cette réalité semble accentuer la prudence des centres. Mais d’après Swisstransplant, le taux d’utilisation a également diminué pour les foies issus de donneurs en mort cérébrale.
Liste d'attente et transplantations en 2024: graphique tiré du rapport annuel de Swisstransplant
Le nombre total de transplantations hépatiques en Suisse a pourtant nettement augmenté ces dernières années. Alors que seuls 36 foies avaient été greffés en 2021, ce chiffre est passé à 133 en 2024. À titre de comparaison, 491 patients suisses étaient inscrits sur la liste d’attente l’année dernière; 36 d’entre eux sont décédés avant d’avoir pu recevoir un organe.
Dans le même temps, 20 foies provenant de donneurs suisses ont été exportés vers l’étranger, bien que la Suisse compte des receveurs en attente. Les médecins suisses les avaient refusés, tandis que leurs homologues étrangers les ont jugés acceptables. Peter Lodge, président de l’European Surgical Association et spécialiste de la transplantation hépatique à Leeds, se montre critique: «Ce qui se passe en Suisse est très inquiétant», déclare-t-il dans la NZZaS. «Il est très inhabituel qu’un pays exporte des organes à l’étranger alors qu’il dispose lui-même d’une longue liste d’attente.»