France: instauration d'un quota de soignants par patient

Le pays voisin adopte une loi prévoyant un nombre minimal de soignants par patient hospitalisé. Comment s'y prendre dans un contexte de pénurie de personnel?

, 27 janvier 2025 à 11:51
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Personnel soignant et médical auprès d'un patient dans un service d'urgence à Saint-Denis | Image: Capture d'écran d'un reportage du média en ligne Konbini.
Une initiative ambitieuse chez nos voisins français: avec le vote de l’Assemblée nationale, le 23 janvier, une proposition de loi visant à instaurer un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé a été adoptée.
Sur 211 votants, 141 suffrages ont été exprimés, permettant l’adoption de la proposition par 138 voix pour, contre 3, et sans aucune modification. Le texte est désormais définitivement adopté par le Parlement, le Sénat ayant déjà voté en faveur de la mesure en 2023.

Quotas par spécialité

La loi prévoit l’instauration de quotas de soignants par spécialité, applicables aux infirmiers, aides-soignants, ainsi qu’à d'autres professions paramédicales et du soin.
C’est à la Haute Autorité de Santé (HAS), autorité publique indépendante, qu’il revient de fixer ces quotas. Selon le texte, ces derniers devront tenir compte «de la charge de soins liée à l’activité», tout en prenant en considération «les besoins spécifiques à la spécialisation et à la taille de l’établissement». La HAS dispose d’un délai de deux ans pour établir ces quotas, qui seront ensuite valables pour une période de cinq ans.

Une «dépense d’investissement»

L’objectif de cette nouvelle loi est clair: améliorer la qualité des soins, renforcer l’attractivité des métiers de soignant, et soutenir des personnels souvent débordés.
Elle émane d’une proposition portée par le groupe de députés socialistes, qui la qualifie de «dépense d’investissement», qui devrait permettre «des prises en charge plus précoces» et «des séjours plus courts» à l’hôpital grâce à «des guérisons plus rapides». En outre, de telles mesures devraient permettre de réduire les risques de maladies nosocomiales et de complications.
«Ces ratios existent déjà dans d’autres pays», précise Guillaume Garot (Socialistes) devant l’Assemblée nationale. «C’est le cas en Californie, c’est le cas aussi en Australie dans l’État du Queensland.» Et d’ajouter: «Dans ces États, l’efficacité est démontrée. Les ratios ont entraîné une amélioration des conditions de travail, donc une amélioration de la qualité des soins pour les patients. Et les résultats sont tout aussi probants sur le plan économique, parce qu’au final, cela permet de générer des économies.»

Et en Suisse?

La Suisse ne dispose pas de loi imposant un ratio fixe entre le nombre d'infirmiers et de patients. Compte tenu de la diversité des situations cliniques et des structures de soins, le Conseil fédéral a estimé qu'il serait complexe d'instaurer un tel ratio. La détermination du nombre et du niveau de qualification des professionnels de santé relèverait donc de la compétence des cantons ou des établissements de santé sous supervision cantonale, dans le cadre de la planification hospitalière prévue par la LAMal. Ces paramètres devraient être adaptés aux besoins spécifiques de chaque population.
En outre, la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) a rappelé qu’en vertu de l'article constitutionnel 117b, adopté en novembre 2021, la Confédération et les cantons ont pour mission de garantir un nombre suffisant d’infirmières et d’infirmiers diplômés, sans toutefois imposer de ratios spécifiques.
L'Observatoire suisse de la santé fournit, quant à lui, des données sur le ratio nurse-to-patient: celles-ci indiquent le nombre d'équivalents plein temps (EPT) de personnel soignant et d'accompagnement, tous niveaux de formation confondus, pour 100 patients pris en charge.
Nombre d'EPT en personnel de soins et d'accompagnement pour 100 patients en Suisse en 2022 – hôpitaux et cliniques
Sources: OFS – Statistique administrative des hôpitaux (KS), Statistique des institutions médico-sociales (SOMED) et Statistique de l’aide et des soins à domicile (SPITEX)
Source: OFS – Statistique administrative des hôpitaux (KS)

«Hôpital: des quotas de soignants par patient, une proposition qui séduit». «Franceinfo», «JT» de 8h, édition du jeudi 23 janvier 2025.

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