«Affaire Maisano»: René Prêtre et Oliver Peters mènent l'enquête

L’Hôpital universitaire de Zurich passe au crible les pratiques controversées de son unité de chirurgie cardiaque. Une commission indépendante, renforcée par des figures médicales de renom, des experts en gouvernance, un biostatisticien et un cabinet d’avocats, mène l’enquête.

, 9 mai 2025 à 13:52
image
Médecine et gouvernance: René Prêtre, Oliver Peters | Images: Canton de Vaud / CHUV
En août 2024, le Conseil de l’Hôpital universitaire de Zurich (USZ) a mis en place une commission chargée d’identifier les zones d’ombre au sein de l’unité de chirurgie cardiaque entre 2016 et 2020. Niklaus Oberholzer, ancien juge fédéral, a été nommé à la tête de cette commission. Comme le révèle désormais un rapport intermédiaire, deux personnalités bien connues figurent parmi ses membres:
  • René Prêtre, qui a dirigé la chirurgie cardiaque à l’Hôpital pédiatrique de Zurich de 2001 à 2012 et qui est aujourd’hui directeur du Service de chirurgie cardiaque et vasculaire au CHUV de Lausanne.
  • Oliver Peters, ancien vice-directeur de l’Office fédéral de la santé publique de 2013 à 2016, puis directeur général adjoint du CHUV de 2016 à 2022. Il est actuellement membre du conseil d’administration du groupe hospitalier Hoch Health Ostschweiz.
Oliver Peters sera principalement chargé de la gouvernance de l’enquête, tandis que René Prêtre se concentrera sur l’analyse des aspects médicaux. Le recours à des experts supplémentaires s’est avéré nécessaire: la commission a donc été élargie à d’autres chirurgiens cardiaques ainsi qu’à un biostatisticien.
Par ailleurs, Niklaus Oberholzer a mandaté le cabinet d’avocats Lexperience pour superviser les aspects conceptuels, organisationnels et administratifs de l’enquête.
Intitulée «UK 16–20», l’enquête de la commission porte sur deux volets, précise encore l’USZ:
  • D’une part, il s’agit de tirer des conclusions définitives concernant l’évolution du taux de mortalité, et donc sur la qualité des soins prodigués.
  • D’autre part, la commission examine les aspects cliniques et économiques des dispositifs médicaux utilisés à l’époque. Elle explorera également les thématiques de l’assurance qualité interne, du respect des réglementations, des conflits d’intérêts et des activités annexes.
En toile de fond: il y a quatre ans, de graves accusations récurrentes ont visé le service de chirurgie cardiaque de l’USZ pour la période 2016–2020. En cause: un taux de mortalité élevé et des soupçons selon lesquels Francesco Maisano, alors chef de service, aurait promu ses propres dispositifs médicaux en tirant profit de sa fonction. Un manque de rigueur scientifique, la publication de rapports erronés, ainsi qu’une culture de conflit interne marquée par la division en deux clans ont également été dénoncés.
Face à ces critiques, la direction de l’hôpital a décidé à l’été 2024 de mettre en place une task force externe chargée d’examiner tous les décès survenus au sein du service de chirurgie cardiaque durant la période concernée. «Nous ne pouvons pas considérer que l’enquête sur les événements passés en chirurgie cardiaque est close», a déclaré André Zemp, président du conseil de l’hôpital. Selon lui, si la direction actuelle est parvenue à «remettre sur pied» le service, il faut néanmoins veiller à ce que de tels dysfonctionnements ne se reproduisent pas. Il en va de la crédibilité de l’établissement.
L’un des éléments déclencheurs de cette nouvelle enquête: les propos de Paul Vogt, successeur de Maisano, qui a qualifié les conditions antérieures de « désastre » lors d’une audience au tribunal au printemps 2024. Il a notamment laissé entendre que le nombre de décès avait été excessif et dissimulé.
Niklaus Oberholzer a par ailleurs élargi la période d’investigation de 2015 à 2021 afin de mieux évaluer l’évolution sur le long terme. Tous les décès et complications opératoires font l’objet d’un contrôle de plausibilité a posteriori, de même que les interventions impliquant certains dispositifs médicaux.
Les conclusions de l’enquête sont attendues pour le début de l’automne 2025. Un rapport sera alors présenté au public, «dans une forme conforme aux exigences de protection des données». D’ici là, la direction de l’hôpital s’abstient de tout autre commentaire sur l’affaire.
Partager l'article

Loading

Commentaire

Plus d'informations sur ce sujet

image

L'UNIGE signe une avancée majeure dans la lutte contre le diabète de type 1

Vivre avec un diabète de type 1 sans dépendre de l’insuline? C’est l’horizon qu’esquisse un consortium européen dirigé par l’Université de Genève, qui présente un pancréas bioartificiel aux résultats prometteurs.

image

«Kidz»: Bâle lance un modèle d'hospitalisation à domicile en pédiatrie

Alors que la prise en charge d'enfants malades à domicile est déjà établie dans certains pays, Bâle ose désormais franchir le pas avec «Kidz», un nouveau projet pilote.

image

Helsana alerte sur la hausse des examens par TDM en Suisse

L’année dernière, plus de 600'000 personnes, soit près de 7% de la population, ont subi au moins un scanner du tronc. L’assureur s’inquiète de cette augmentation.

image

Septième cas mondial de rémission du VIH après une greffe de cellules souches

Un sexagénaire est considéré guéri du VIH. Selon des scientifiques berlinois, son cas est d’autant plus remarquable que les cellules souches transplantées n’étaient pas résistantes au virus.

image

Épilepsie et mort subite: «Une révolution culturelle s'impose»

Philippe Ryvlin, neurologue au CHUV, a identifié deux nouveaux facteurs de risque majeurs du décès soudain d’une personne atteinte d'épilepsie sans cause apparente. Interview.

image

RHNe: vers un seul site de soins aigus stationnaires?

En 2017, les Neuchâtelois avaient choisi de maintenir deux sites de soins aigus. Aujourd’hui, le Réseau hospitalier envisage de concentrer l’activité stationnaire aiguë sur un seul site, relançant ainsi le débat sur l’avenir de l’hôpital.

Du même auteur

image

Là où les équipes soignantes sont fortes, les médecins s’épuisent moins

Selon une vaste étude internationale, les médecins sont moins épuisés et plus enclins à rester en poste lorsque les équipes infirmières sont suffisamment dotées et que le climat de travail soutient la pratique clinique.

image

Urgences: pourquoi l'idée d'une taxe ne convainc pas – et ce qu'en disent les spécialistes

Alors que doivent débuter les débats au Conseil national, les médecins urgentistes mettent à nouveau en garde contre l'idée d'une «taxe pour les cas bénins». Ils proposent quatre alternatives concrètes.

image

Swiss Medical Network: Nello Castelli rejoint Pharmasuisse

L'actuel secrétaire général de Swiss Medical Network devient directeur des affaires publiques au sein de la Société suisse des pharmaciens.