Même endormi, le cerveau reste à l’écoute du danger

Une étude de l’Université de Genève et de l’Institut Pasteur révèle que les cris ou les alarmes déclenchent des réponses cérébrales spécifiques pendant le sommeil.

, 26 juin 2025 à 23:08
image
Image symbolique réalisée avec l'IA: Medinside
Le cerveau ne dort jamais complètement. Même en phase de repos profond, il continue à surveiller son environnement. Des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE) et de l’Institut Pasteur viennent de démontrer que les sons dits «rugueux» – typiques des cris humains, des alarmes ou des pleurs de nourrissons – déclenchent systématiquement des réactions cérébrales nocturnes.
  • Legendre, G.Y.T., Moyne, M., Domínguez-Borràs, J. et al.: «Scream’s roughness grants privileged access to the brain during sleep», dans: «Scientific Reports», mai 2025.
  • Doi: 10.1038/s41598-025-01560-8
Ces résultats, publiés dans «Scientific Reports», permettent de mieux comprendre certains troubles sensoriels comme l’hyperacousie, mais aussi l’impact des nuisances sonores nocturnes sur notre santé.

La rugosité sonore, un signal d’alerte inné

La rugosité est une caractéristique acoustique définie par des modulations rapides de l’intensité sonore (40 à 100 Hz). Elle diffère fortement du rythme plus lent de la parole, «dont le rythme syllabique varie entre 4 et 8 Hz», explique Luc Arnal, chercheur à l’Institut Pasteur, dans un communiqué.
Les sons rugueux «bombardent le système auditif à haute fréquence, créant une sensation de stridence souvent désagréable», poursuit-il. Ces stimuli activent notamment l’amygdale, région du cerveau liée aux émotions et à la vigilance.

Enjeux médicaux et sociétaux

Ces travaux éclairent aussi des mécanismes impliqués dans certaines pathologies: hyperacousie, acouphènes, épilepsie ou encore maladie d’Alzheimer, où le traitement auditif est parfois altéré. «La surexposition à ces fréquences sonores déclenche des réactions émotionnelles très différentes selon les individus, allant jusqu’à des réactions totalement irrationnelles et même potentiellement violentes», note Luc Arnal.
«Nos investigations sont non seulement centrales pour comprendre certaines pathologies comme l’hyperacousie mais aussi pour décrire et expliquer l’impact très sérieux de l’environnement sonore sur la santé, en particulier la nuit.» Sophie Schwartz, Faculté de médecine de l’UNIGE et co-directrice de l’étude.
Dans un monde de plus en plus bruyant, ces résultats sont un signal d’alarme. «Il est essentiel de décrypter comment les sons affectent l’activité de notre cerveau pendant le sommeil et, par là-même, la santé physique et mentale de chacune et chacun d’entre nous», souligne Sophie Schwartz, co-directrice de l’étude.
    Partager l'article

    Loading

    Commentaire

    Plus d'informations sur ce sujet

    image

    Vaccins à ARNm: plusieurs millions de données pour rassurer les sceptiques

    Une étude d’ampleur livre des résultats sur la sécurité des vaccins à ARNm contre le Covid-19. Résultat: une baisse significative de la mortalité liée à la maladie, et une surprenante réduction de la mortalité toutes causes confondues.

    image

    Cliniques de dermatologie: les raisons du succès

    Le nombre de cliniques de dermatologie augmente rapidement en Suisse. Derrière l’expansion de groupes comme Matignon, Skinmed, Delc ou Dermis se cache un marché en plein essor.

    image

    Agenda soins de base: H+ déplore la place accordée aux hôpitaux

    L’association des hôpitaux H+ se positionne sur le rapport spécialisé de l’Agenda soins de base: pour elle, le rôle essentiel des hôpitaux et des cliniques n’y est pas suffisamment pris en compte.

    image

    L'UNIGE signe une avancée majeure dans la lutte contre le diabète de type 1

    Vivre avec un diabète de type 1 sans dépendre de l’insuline? C’est l’horizon qu’esquisse un consortium européen dirigé par l’Université de Genève, qui présente un pancréas bioartificiel aux résultats prometteurs.

    image

    Urgences: pourquoi l'idée d'une taxe ne convainc pas – et ce qu'en disent les spécialistes

    Alors que doivent débuter les débats au Conseil national, les médecins urgentistes mettent à nouveau en garde contre l'idée d'une «taxe pour les cas bénins». Ils proposent quatre alternatives concrètes.

    image

    Swiss Medical Network crée la région «Arc lémanique», Stanley Hautdidier en prend la direction

    Le groupe de cliniques privées poursuit sa réorganisation: Vaud et Genève seront réunis au sein de la région «Arc Lémanique», confiée à Stanley Hautdidier. Vincent Michellod rejoint la direction générale, tandis que Nello Castelli la quitte.

    Du même auteur

    image

    Septième cas mondial de rémission du VIH après une greffe de cellules souches

    Un sexagénaire est considéré guéri du VIH. Selon des scientifiques berlinois, son cas est d’autant plus remarquable que les cellules souches transplantées n’étaient pas résistantes au virus.

    image

    Épilepsie et mort subite: «Une révolution culturelle s'impose»

    Philippe Ryvlin, neurologue au CHUV, a identifié deux nouveaux facteurs de risque majeurs du décès soudain d’une personne atteinte d'épilepsie sans cause apparente. Interview.

    image

    Embouteillage pour l'obtention d'un titre: l'ISFM réduit les frais de moitié avec effet rétroactif

    Suite aux interventions de plusieurs associations, l’ISFM réagit en réduisant temporairement de moitié les frais d’obtention d’un titre, avec effet rétroactif. Cette concession ne marque toutefois pas la fin du problème, bien au contraire.