La formation en chirurgie s’apparente à un véritable marathon. En Suisse, les six années d’études de médecine sont suivies d’au moins autant d’années de spécialisation, qui s’étendent souvent jusqu’à la fin de la trentaine. À ce prix, la carrière décolle. Mais pour les femmes, ce calendrier implacable a une conséquence directe: l’âge de la maternité recule – parfois trop.
Une récente étude publiée dans le «British Journal of Surgery» met en lumière les dilemmes de procréation et de parentalité chez les jeunes chirurgiens et chirurgiennes en Suisse. Plus de 300 titulaires du titre FMH ont répondu à un questionnaire anonyme. Résultat: les contraintes du métier, la densité des journées et les horaires décalés pèsent lourdement sur les choix personnels – et tout particulièrement sur les femmes.
Report de la parentalité: non sans conséquences
Près des trois quarts des chirurgiennes interrogées ont retardé une grossesse en raison de leur formation. Elles fondent une famille plus tard que leurs collègues masculins ou que les conjointes de ceux-ci. Ce décalage se traduit par des taux d’infertilité plus élevés (23% contre 10%) et un recours accru à la procréation médicalement assistée.
Temps partiel: un faux privilège?
Le travail à temps partiel, plus souvent adopté par les femmes (37,6% contre 18,5%), dure également plus longtemps chez elles. Pourtant, il ne les ralentit pas: les chirurgiennes obtiennent leur titre FMH dans des délais comparables à ceux des hommes. Reste que plus de la moitié des participants auraient souhaité réduire leur activité, sans en avoir parlé à leurs supérieurs. Au-delà des questions de genre, c’est donc la culture de la profession qui semble freiner toute discussion sur l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle.
Soutenir les vocations
À ces contraintes pratiques s’ajoute une charge psychologique: deux tiers des participantes estiment que leur genre a eu un impact négatif sur leur carrière, contre seulement 6% des hommes. Un constat qui pose la question de l’attractivité de la chirurgie pour les jeunes femmes médecins.
Pour les auteurs de l’étude, la conclusion est sans équivoque: la chirurgie suisse ne peut se permettre de perdre des talents en raison d’obstacles liés à la parentalité. Ils appellent à des réformes structurelles: rendre les parcours plus flexibles, créer un environnement moins hostile à la maternité et garantir une réelle égalité des chances.