Ce qui fait depuis longtemps partie du quotidien dans l'aviation est encore loin d'être acquis dans le secteur de la santé: la sécurité psychologique. Elle permet une communication ouverte, des hiérarchies plates et une gestion constructive des erreurs, et peut faire la différence entre la vie et la mort.
Plusieurs études et expériences récentes le montrent: lorsque les équipes médicales adoptent les normes de communication en vigueur dans le cockpit, les performances de l'équipe augmentent et la sécurité des patients s'améliore de manière mesurable.
«Même le plus jeune copilote doit oser signaler une erreur potentielle au commandant de bord», explique Philippe Ammann, commandant de bord et formateur chez Swiss International Air Lines. Selon lui, cette culture n'est pas le fruit du hasard, mais le résultat de décennies de travail sur la gestion d'équipe et la communication des erreurs. Dans le quotidien d'une clinique, par exemple en psychiatrie, la sécurité psychologique peut également faire la différence entre réussite et échec.
Fabian Kraxner est médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie dans le canton de Zurich. Il a reçu le Early Career Fellowship Prize à Paris pour ses mérites en matière de promotion de la relève. Il est cofondateur et directeur médical de la Mental Health Company.
Philippe Ammann est commandant de bord chez Swiss avec plus de 30 ans d'expérience de vol. Il forme les futurs commandants de bord à travers des cours de leadership et accompagne des équipages entiers dans le cadre d'entraînements d'équipe annuels. En tant que cofondateur de medLEAD360 et directeur de Pilot Impuls, il apporte son savoir-faire de l'aviation aux hôpitaux, à l'industrie et aux entreprises.
Conséquences
Ne pas aborder ouvertement au sein de l'équipe des sujets critiques comme la suicidalité ou l'escalade des crises peut avoir de graves conséquences.
«La sécurité psychologique est essentielle pour un travail d'équipe efficace dans le secteur de la santé comme de l'aviation» —Fabian Kraxner
Exemple classique: un jeune médecin hésite à signaler à un chef de clinique expérimenté des signes vitaux inquiétants – de peur d'être considéré comme incompétent. De telles situations illustrent comment les barrières hiérarchiques et le manque de culture de communication peuvent mettre en péril la sécurité des patients.
Sécurité psychologique
La sécurité psychologique signifie que les membres de l'équipe osent poser des questions, reconnaître leurs erreurs ou demander de l'aide sans craindre d'être jugés négativement. Ce n'est pas une invitation à l'arbitraire ou à la négligence, mais une condition préalable à un retour d'information ouvert, à la pensée critique et à la responsabilité partagée.
Cela renforce non seulement l'efficacité, mais aussi la qualité des décisions cliniques. Lorsque les cadres montrent leur propre faillibilité, cela favorise une culture de confiance et de transparence.
Le rôle clé du leadership
Un leadership autoritaire, qui ne tolère aucune remise en question, peut engendrer une attitude fataliste face à l’erreur. À l’inverse, les résultats sont bien meilleurs dans les équipes où les responsabilités sont partagées et où le feedback constructif est encouragé. Cela demande un leadership conscient, des structures de communication claires et une volonté d’apprentissage continue de la part de toutes et tous.
La sécurité psychologique ne se développe pas spontanément. Elle doit être construite de manière proactive: à travers des discussions de cas structurées, des réunions interhiérarchiques, des transmissions standardisées, des séances de réflexion régulières et des formations ciblées. Les protocoles de communication et les simulations jouent également un rôle clé dans la maîtrise des situations critiques.
Conclusion
La sécurité psychologique n’est pas un concept abstrait, mais une condition indispensable à la performance et à la sécurité dans les systèmes complexes – comme le secteur de la santé. L’aviation offre des enseignements précieux pour instaurer une culture qui ne punit pas les erreurs, mais les utilise comme leviers d’apprentissage. Au final, ce ne sont pas seulement les équipes qui en bénéficient, mais surtout les patientes et les patients.