Cashbacks dans le domaine de la santé: le Conseil fédéral doit agir

Le Conseil national appelle à la mise en place d’un catalogue de mesures contre les rétrocessions cachées versées aux prestataires de soins – une décision motivée par des révélations sur un laboratoire genevois qui aurait versé d’importantes sommes à certains cabinets.

, 8 mai 2025 à 11:08
image
«Les faits exposés dans ce postulat sont simples, mais choquants»: Philippe Nantermod, conseiller national | Image: nantermod.com
Le Conseil national a approuvé hier un postulat demandant l’élaboration d’un catalogue de mesures contre les rétrocessions, également appelées «cashbacks», versées à des cabinets médicaux ou à des cliniques. Cette initiative a été déposée par le conseiller national valaisan Philippe Nantermod (PLR), à la suite d’un reportage diffusé par la RTS durant l’été 2023. Ce dernier révélait qu’un laboratoire genevois versait des contributions substantielles à des cabinets médicaux, allant jusqu’à couvrir des frais de location ou à participer au salaire d’assistantes médicales.
Dans sa réponse au postulat, le Conseil fédéral avait d’abord temporisé, affirmant que la législation actuelle est déjà claire: un fournisseur de prestations, tel qu’un cabinet médical, est tenu de répercuter aux patients ou aux assureurs tout versement perçu en lien avec un mandat concret. Les contributions générales ne sont pas illégales en soi, mais elles doivent bénéficier, en fin de compte, aux assurés. Selon le gouvernement, il appartient d’abord aux assureurs de faire valoir ce droit, les cantons étant ensuite chargés de veiller au respect des prescriptions légales.
En résumé, le Conseil fédéral estimait qu’une intervention à l’échelle fédérale n’était pas nécessaire.
Philippe Nantermod a cependant mis en avant un conflit d’intérêts: «Les cantons, qui exercent la fonction d’autorité de surveillance, sont souvent propriétaires des laboratoires via les hôpitaux cantonaux. Or, ils tolèrent ces pratiques, pourtant clairement illégales.»

Cinq francs par ordonnance?

Lors du débat parlementaire de mercredi, Thomas Bläsi (UDC, Genève) a soutenu la position de son collègue valaisan et évoqué le cas du groupe de pharmacies Zur Rose, qui verserait cinq francs par ordonnance selon un système comparable. La question suivante se pose alors: jusqu'à quel point la discussion s'enlise-t-elle dans quelques vieux mythes? Zur Rose tient à souligner que la déclaration du Conseil national est erronée: «Une indemnisation des dépenses aux cabinets médicaux par une pharmacie de vente par correspondance comme Zur Rose n'existe plus depuis plus de dix ans, contrairement à ce que M. Bläsi affirme à tort. Il en a été décidé ainsi par le Tribunal fédéral et Zur Rose a toujours respecté le cadre légal.»
Interrogée sur l’ampleur d'un possible financement parallèle, la ministre de la Santé, Elisabeth Baume-Schneider, a reconnu ne pas en savoir plus, ni connaître de montants exacts, tout en admettant qu’il s’agit de sommes importantes.
Le vote s’est soldé par 109 voix contre 81. Le Conseil fédéral est désormais chargé d’élaborer un catalogue de mesures « qui pourra être mis en œuvre pour mettre un terme aux pratiques de rétrocessions – ou « cashback » – qui sévissent toujours dans le domaine de la santé couvert par l’assurance obligatoire des soins ».

«Les pratiques interpellantes d'un laboratoire d'analyses», émission «A Bon Entendeur» du 22 août 2023.


Partager l'article

Loading

Commentaire

Plus d'informations sur ce sujet

image
Question juridique de la semaine

Assurance complémentaire: clauses d'indexation – clé de partenariats tarifaires stables

Elles permettent une planification sûre, réduisent les coûts de négociation et assurent la transparence. Pourtant, les assureurs sont sceptiques vis-à-vis des clauses d'indexation. Ils craignent les écueils réglementaires. À juste titre?

image

Demande de remboursement: le Tribunal fédéral se range à nouveau du côté d'une médecin

Une vingtaine de caisses maladie exigeaient d'une médecin le remboursement de 135'000 francs. Le Tribunal fédéral demande une nouvelle évaluation.

image

Initiative pour les soins: la Commission veut passer à la vitesse supérieure

La Commission de la santé du Conseil national se prononce en faveur d'une passerelle plus attrayante entre les écoles supérieures et les hautes écoles spécialisées.

image

Médecins en Valais: hausse du point Tarmed après neuf ans de statu quo

Neuf ans de blocage, huit ans de procédure et de négociations: la valeur du point Tarmed grimpe de trois centimes pour les cabinets médicaux valaisans, avec effet rétroactif.

image

Neuchâtel: fin de l’âge limite pour les médecins

Estimant que la limite d’âge de 80 ans contrevenait au droit fédéral, le Conseil d’État neuchâtelois a proposé son abolition. Le Grand Conseil vient de l’entériner.

image

Listes d'hôpitaux: la pression sur les cantons augmente

Après le Conseil des Etats, le Conseil national fait à son tour pression sur les cantons pour harmoniser la planification hospitalière et les mandats de prestations.

Du même auteur

image

Premier Romand président de ChiroSuisse

Avec le Valaisan Alexandre Emery, c'est la première fois qu'un Romand accède à la présidence de l'association professionnelle des chiropraticiens de Suisse.

image

Les smartwatches rendraient les médecins plus résistants

Une récente étude livre des résultats surprenants: les médecins qui suivent leurs données de santé grâce à une montre connectée voient leur risque de burnout diminuer et leur résilience se renforcer.

image

Des postes de médecins vacants pendant près de deux mois

Grâce à un nouvel outil d’analyse, l’Obsan met en lumière plusieurs évolutions marquantes du corps médical: le nombre de postes vacants est en augmentation et plus de 30% des cabinets de médecine générale refusent de nouveaux patients.