Aide au suicide: pour le Conseil fédéral, il n’est pas nécessaire de légiférer davantage

Saisie par la commission des affaires juridiques du Conseil des États, qui souhaite clarifier les conditions et procédures du suicide assisté, le Conseil fédéral ferme la porte à une nouvelle réglementation.

, 4 septembre 2025 à 13:51
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Lors de sa séance du 3 septembre, le Conseil fédéral a refusé de donner suite à une demande de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États visant à renforcer l’encadrement du suicide assisté en Suisse. Selon ce dernier, le cadre juridique actuel est «déjà suffisamment clair» et il n’est pas nécessaire d’aller plus loin.

Une demande pour clarifier la pratique

La commission souhaitait que la Confédération élabore une réglementation-cadre décrivant précisément les conditions d’accès au suicide assisté, les procédures à respecter et les mécanismes de surveillance.
Cette requête faisait notamment suite à plusieurs interventions parlementaires, dont celles des conseillers aux États Hässig (24.4217, «Comment intégrer l’aide au suicide dans une société libérale?») et Jost (24.4609, «Assistance au suicide pour les personnes en bonne santé : faut-il adapter la législation?»).
Les partisans de cette démarche invoquent la nécessité de mettre fin à une forme d’insécurité juridique. Selon eux, l’absence de normes fédérales claires fragilise le «modèle suisse», actuellement basé presque exclusivement sur l’article 115 du Code pénal, qui interdit l’assistance au suicide uniquement lorsqu’elle est motivée par un mobile égoïste.

Un recours en hausse

La commission souligne également l’augmentation du nombre de suicides assistés dans le pays. Les femmes y recourent plus souvent que les hommes, même si les statistiques disponibles restent partielles.
En 2023, selon l’Office fédéral de la statistique (OFS), 1'036 femmes (âgées en moyenne de 80 ans) et 693 hommes (78 ans en moyenne) ont mis fin à leurs jours avec assistance. Cette différence s’explique principalement par des facteurs démographiques, en particulier la plus longue espérance de vie des femmes. Avec le vieillissement de la population, ce phénomène devrait encore s’accentuer.

La position du Conseil fédéral

Dans sa réponse, le Conseil fédéral rappelle que la Suisse dispose déjà d’un cadre légal étoffé, qui combine le Code pénal, la loi sur les professions médicales, les réglementations cantonales et les codes de déontologie médicale.
«Le cadre juridique du suicide assisté est déjà suffisamment clair aujourd’hui», affirme-t-il. Le gouvernement rappelle notamment que:
  • le Tribunal fédéral a jugé en 2021 et 2024 que les médecins ne peuvent pas prescrire de pentobarbital de sodium à une personne en bonne santé;
  • les autorités cantonales de surveillance peuvent sanctionner les manquements, allant jusqu’à l’interdiction définitive d’exercer;
  • plusieurs cantons (Genève, Vaud, Neuchâtel, Valais, Zurich) disposent déjà de règles précises encadrant la pratique dans les hôpitaux, les EMS ou les institutions publiques.
Le Conseil fédéral insiste en outre sur le fait que la Confédération n’a pas la compétence d’édicter une réglementation générale des organisations d’aide au suicide, cette responsabilité revenant en premier lieu aux cantons.

Pas de nouvelle loi, mais un rapport possible

Si la motion devait néanmoins être adoptée par le premier conseil, le gouvernement se réserve le droit de la modifier en demandant, dans un premier temps, la rédaction d’un rapport exploratoire. Celui-ci permettrait de préciser les conditions, procédures et mécanismes de surveillance envisageables.
Mais pour l’heure, le Conseil fédéral recommande le rejet pur et simple de la proposition, confirmant son attachement à un modèle qu’il juge «modéré et équilibré».
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