Médecins originaires de l'UE: tensions sur les règles d’admission

La Suisse pourra-t-elle à l'avenir maintenir ses exigences linguistiques et d’expérience pour les médecins en provenance de l’Union européenne? L’UDC interpelle le Conseil fédéral.

, 19 septembre 2025 à 23:00
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La Cour de justice de l’UE à Luxembourg a son mot à dire sur l’accès des médecins étrangers au marché suisse | Image: DR
Bien sûr, ce n’est qu’une des provocations par lesquelles les opposants tentent de faire échouer le nouveau paquet d’accords entre la Suisse et l’UE. D’un autre côté, Mike Egger, conseiller national de l’UDC, introduit tout de même dans le débat une question qui n’a guère été abordée jusqu’à présent: l’accord-cadre prévu pourrait-il assouplir les conditions d’admission des médecins étrangers? Pourrait-il faciliter l’afflux de médecins en provenance de l’UE?
Egger vient de déposer une interpellation à ce sujet au Conseil national. Son titre: «Possible explosion des coûts des primes d’assurance-maladie et mise en danger de la sécurité des patients par la renégociation de l’ALCP?»
Le Conseil fédéral avait auparavant constaté qu’une partie de la loi sur l’assurance-maladie n’était pas compatible avec la jurisprudence de l’UE, à savoir l’article exigeant des médecins étrangers, d’une part, la maîtrise d’une des langues nationales et, d’autre part, trois ans d’expérience dans un établissement de formation postgraduée suisse reconnu.

«Incendiaire»

Le représentant de l'UDC saint-gallois fait maintenant référence à un «laissez-passer» pour les médecins de l’UE. Il exhorte le gouvernement à indiquer le risque qu’un jour la Cour de justice européenne impose une adaptation des règles suisses pour les médecins. «C'est incendiaire: la sécurité des patients serait menacée et les primes d'assurance maladie exploseraient», soutient Egger auprès de «20 Minuten».
La professeure de droit européen Astrid Epiney estime également qu’un conflit est probable: «L’article 37 a un caractère discriminatoire – il concerne en premier lieu les étrangers. L’accord sur la libre circulation des personnes interdit en principe de telles dispositions», explique la juriste.
La Suisse pourrait toutefois réclamer des dérogations. La directive européenne sur la libre circulation autorise les États à mettre en place certaines restrictions, qui doivent être justifiées par des objectifs d’intérêt public.
Selon Astrid Epiney, la Suisse devrait au moins pouvoir justifier ses exigences linguistiques par «l’intérêt général de la santé publique» et donc les maintenir. Quelle qu’en soit l’issue, l’UE n’aurait guère intérêt à faciliter davantage l’émigration de ses médecins vers la Suisse.

«Existentiel»

La Fédération des médecins suisses (FMH) prend également position dans «20 Minutes»: «Compte tenu de la forte dépendance du pays vis-à-vis de l’étranger sur le plan du personnel comme du matériel, nous partons du principe que le plus grand risque d’une pénurie d’approvisionnement résulterait d’une absence de réglementation avec l’UE. De ce point de vue, nous aurons donc un besoin urgent de cet accord.»
Yvonne Gilli, présidente de la FMH, s’est récemment prononcée en faveur de l’accord de rattachement dans le cadre de l’action «Femmes Pro Bilatérales»: «La libre circulation des personnes est essentielle pour notre système de santé. Notre secteur dépend fortement des spécialistes des pays voisins. Il est donc crucial que cet accès soit assuré de la manière la plus simple et la plus fiable possible», explique-t-elle. Et d’ajouter: «En l’absence de libre circulation des personnes, nos cabinets et nos hôpitaux devraient démontrer, dans le cadre de procédures coûteuses et individualisées, qu’ils ne trouvent pas de main-d’œuvre appropriée en Suisse. Cela aggraverait encore la situation financière déjà précaire de nombreux hôpitaux, mais aussi de nombreux cabinets médicaux.»
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